Pense aux pierres sous tes pas d’Antoine Wauters

Deux faux jumeaux, Marcio et Léonora, vivent au cœur d’une région rurale dans un pays en proie à une dictature militaire. Leurs parents, qu’ils nomment Paps et Mams, passent leur temps à les frapper, à les insulter et à les obliger à travailler dans les champs ou dans la maison. Et malgré leur travail, les enfants, à l’image de la famille, ne mangent pas à leur faim et vivent dans un véritable taudis.

En grandissant, les deux enfants deviennent de véritables sauvageons et commencent à explorer leurs corps. Ils sont surpris un jour par leurs parents qui décident de les séparer. Marcio restera à la ferme avec ses parents pour y travailler. Léonora sera envoyée chez un cousin pour aider à l’entretien de la maison.

Les deux enfants au moment de leur séparation jurent de se retrouver et de se venger de leurs parents, quel qu’en soit le prix.

Roman étrange et difficile à appréhender. Une carte enfantine ouvre le roman et semble dessiner les contours d’un vague pays en proie à la dictature. Cette même carte clôt le roman et même si elle comporte quelques modifications, on n’en comprend pas bien l’utilité (mais peut-être est-ce voulu ?).

Dans cette géographie improbable, le narrateur — Léonora — décrit une enfance faite de violence, de travail forcé et de misère. Les deux enfants sont extrêmement sexualisés, ils couchent ensemble et Léonora — une fois séparée de son jumeau — va se prostituer pour quelques piécettes. L’atmosphère du roman est poisseuse, glauque pour ne pas dire malaisante. L’auteur s’appesantit parfois sur les violences subies par les enfants et surtout sur les jeux sexuels qu’ils pratiquent régulièrement. Comme nous suivons le récit de la jeune fille, il n’y a pas vraiment de mise à distance : le texte est donc cru, les mots presque cliniques tout en s’ornant d’une licence poétique pour le moins troublante. Et que j’apprécie peu.

« puis, pendant que je prenais Zbabou en bouche — une main serrant sa queue et ma langue faisant le reste — lui, qui ne pouvait toujours pas respirer, glissait sa main où ça me faisait trembler et où j’étais vivante. / Le reste alors n’importait plus. Il n’y avait plus que nous. Nous et les arbresNous et le vent. »

Les protagonistes de ce roman évoluent dans une nature sauvage, luxuriante mais violente loin de la ville caractérisée par ses lieux de pouvoir, sa modernité, ses conflits et son relatif calme. Seul lien entre le monde de la ville et celui des jumeaux, les taxes que le pouvoir exige des habitants. Cette ode à la liberté, y compris incestueuse, face à une modernité conspuée me laisse songeuse. J’avoue ne pas bien saisir le propos.

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